mardi 22 avril 2014

Les marques doivent se construire en système : produits, objets connectés, services

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Entretien : Alexis Thobellem

, en charge des médias sociaux et des objets connectés, Global Digital Group Danone
mardi 15 avril 2014

Au sein du groupe Danone, Alexis Thobellem est en charge des médias sociaux et des objets connectés. Un poste d'observation unique sur un phénomène « pop corn », qui éclate dans tous les sens. Pour lui, les marques mêmes industrielles, ne doivent pas passer à côté de ce phénomène. Elles doivent inventer leurs propres objets connectés. Comme le fait Evian avec la Smart Drop.

Les chiffres clés11% de la population française (âgée de plus de 18 ans) est actuellement équipée d'un objet connecté. Soit plus de 5 millionsde personnes.
14% des 18-24 ans dispose d'appareils comme une smartwatch, un traqueur connecté, un coach numérique, une balance intelligente.
6% des Français ont déjà des balances intelligentes (type Withings)
2% sont propriétaires de tensiomètres, montres et traqueurs
12% des sondés disent vouloir s'équiper d'ici 3 ans.
11 millions de Français seraient équipés en 2017. 

Deux freins à leur adoption :
- Manque de conviction dans l'efficacité de la mesure (50% des réponses).
- Craintes relatives à la confidentialité des données récoltées (29% des réponses). 

Etude réalisée par l'Atelier BNP Paribas et publiée en Décembre 2013
Alexis Thobellem - en charge des médias sociaux et des objets connectés, Global Digital Group Danone
Bio expressAlexis Thobellem est âgé de 37 ans. Après Mashable et l'agence Isobar, il a rejoint Evian en 2009 après avoir été Social Media Manager de BETC Digital. Il s'est illustré par les campagnes Roller Baby et baby&me pour Evian qui sont des succès mondiaux. Il a également initié le site d'open brand content, EvianThe Source. Depuis septembre 2013, il est membre de l'équipe Danone Group Global Digital, placée sous la direction de Michael Aidan. Il est en charge de medias sociaux et des objets connectés.

Son Twitter : @EasyAlexis
Pourquoi un groupe alimentaire comme Danone s'intéresse-t-il aux objets connectés ?
Alexis Thobellem : « Tout simplement parce que le groupe est une entreprise dont la vocation est d'apporter la santé par l'alimentation. Les premières applications grand public des objets connectés sont liées au « quantified self », à la mesure des données personnelles dans le sport, la santé (fréquence cardiaque, sommeil, calories...). Notre intérêt est donc logique et naturel. Il y a un an, lors de la création de l'équipe digitale groupe de Danone sous l'égide de Michael Aidan, directeur digital du groupe, j'ai été chargé des médias sociaux et des objets connectés. Parmi nos projets, il y a bien sûr le lancement, en beta-test, de la « Smart Drop ». Ce petit objet en forme de goutte d'eau se pose sur son réfrigérateur, comme un magnet. Il permet de passer commande à distance, et de s'approvisionner en bouteilles d'Evian de manière ludique, via le service Evianchezvous. Je n'en dirai pas plus pour l'instant. »
Toutes les marques devraient-elles s'emparer du sujet pour anticiper de nouveaux usages ?
A.T. : « Oui. Assurément. Ce n'est pas un simple phénomène de mode. Dans le BtoB, cela existe depuis très longtemps. Grâce à des petits capteurs, on peut suivre la circulation d'une palette sur une ligne de fabrication ou dans un entrepôt. Ce que l'on découvre aujourd'hui, ce sont les horizons ouverts par ces technologies du « sans contact » dans les produits grand public. Cette mutation s'annonce encore plus radicale que les autres : web, mobile, réseaux 
sociaux. »
Balances, mais aussi bracelets, lunettes, chaussures,... A quel rythme ces « coachs électroniques », ces « connected devices » vont-ils s'imposer dans notre vie quotidienne ? Comment envisagez- vous leur développement ?
A.T. : « C'est un marché pop corn, qui éclate encore dans tous les sens. A ce stade, il est évidemment très difficile de prédire l'avenir.
On peut s'attendre, je pense, à ce que le scénario se déroule en trois temps. Dans un premier temps, cela sera essentiellement une histoire de com'. Puis viendra le moment de l'apprentissage des usages, avec les premiers vrais produits, comme la Smart Drop Evian. Chez Danone, on a des convictions et des intuitions sur l'utilité de la Smart Drop, dont le principe a été présenté dès 2012. Mais le seul juge sera l'utilisateur final. Nous devons avoir l'obsession de l'usage et de l'adoption : le dialogue machine-utilisateur doit être naturel, fluide, sans friction.
Enfin, on assistera à l'apparition d'une nouvelle génération d'objets, plus...scientifiques, avec un rapport à la vérité des données moins biaisées que la génération précédente.
A l'heure actuelle, les « Fitness Trackers » forment l'avant-garde d'une adoption massive des objets connectés. Ces bracelets qui mesurent les calories que l'on dépense en une journée ou le nombre de pas que l'on fait font des millions d'adeptes parmi les sportifs, ou parmi ceux qui veulent maigrir. Mais ils ne sont pas toujours capables de traquer ce qui intéresse vraiment les utilisateurs, la perte de masse graisseuse par exemple plutôt que les calories dépensées. Je pense qu'on verra apparaître dans deux ans une nouvelle génération de capteurs. Ceux-ci délivreront des données sérieuses, efficaces et directes. Ils répondront réellement aux besoins implicites du consommateur. Mais l'information diffusée va rapidement devenir gratuite. C'est une des lois d'Internet. Demain, ces coachs sportifs, ces assistants numériques rejoindront le rang des clés USB parmi les « goodies » offerts par les entreprises. »
Quel est le troisième acte de cette explosion annoncée ?
A.T. : « Je pense que s'ouvrira une nouvelle séquence, celle où les objets connectés dialogueront directement avec les imprimantes 3D pour fabriquer des produits personnalisés à domicile. Oréo vient par exemple de présenter une imprimante 3D qui fabrique des gâteaux en fonction des conversations sur Twitter. Demain, on peut imaginer que vous puissiez fabriquer à domicile des gâteaux qui soient parfaitement dosés en potassium en magnésium... en fonction de votre activité physique de la journée. Est-ce dans 5 ou 10 ans ? Je ne sais pas mais c'est un des scénarii possibles. »
Peut-on imaginer la même convergence entre objets connectés et imprimantes 3D dans d'autres secteurs ?
A.T.. : « Oui. Le textile par exemple. Quelle frustration que de voir un vêtement sur internet, de ne pas être sûr que la coupe vous aille et d'attendre la livraison. Demain, vous pourrez peut-être le snaper, le cliquer, et en quelques instants il sera fabriqué juste à côté de vous. C'est de la science-fiction aujourd'hui. Mais cela va devenir possible. 

C'est une révolution qui aura beaucoup d'avantages en matière de développement durable, de gestion des flux. Elle enrichira les modèles économiques et bouleversera les frontières entre fabrication et services. »
Google avec ses Google Glass ou Nike avec ses bracelets Fuel Band... D'autres exemples de pionniers ?
A.T. : « Google est un cas à part. Mais Nike poursuit en effet une vraie stratégie, cohérente avec son ADN, avec le bracelet Nike Band. Avec ce bracelet, à prix abordable, on peut non seulement connaître ses performances mais aussi les partager sur les réseaux sociaux. Les autres exemples qui me viennent à l'esprit sont Danone bien sûr avec la Smart Drop ou encore le groupe de spiritueux Pernod Ricard qui propose un bar à cocktail, interactif, baptisé Gutenberg. »
Les marques doivent-elles inventer leurs propres capteurs en fonction de leur activité, se lancer dans la fabrication d'objets connectés ?
A.T. : « Bien sûr. Bientôt, il n'y aura plus d'objets inertes, plus d'objets « inanimés ». On pourra dialoguer à distance avec sa machine à laver, son appareil de chauffage... Dans la santé, les perspectives sont énormes. Mais quelque soit le secteur, chaque marque devra étudier un ou deux objets connectés sur son domaine de prédilection. Ces propositions devront rester simples, logiques, fluides et en cohérence avec leur stratégie. Car les grandes entreprises ne peuvent pas laisser le champ libre aux startups. Il leur faut offrir des services additionnels grâce à ces objets connectés pour enrichir l'expérience à la marque. Elles doivent se constituer en système : produits + objets connectés ou capteurs + services. Voilà le triangle vertueux. »
Objets connectés et Big Data. Quelles garanties les marques devront-elles apporter en termes de transparence et de confidentialité des données ?
A.T. : « On avait déjà ce défi de la confidentialité et du Big Data avec le Social Listening. Certes, les objets connectés vont multiplier les datas. Est-ce qu'on va utiliser ces données CRM pour améliorer le produit ? Oui, bien sûr. D'ailleurs le consommateur nous en voudrait de ne pas le faire. Mais va-t-on pour autant abuser de ces données ? C'est nous faire un mauvais procès. Comme le souligne Rafi Haladjian, pionnier des objets connectés avec le lapin Nabaztag et aujourd'hui Mother : « Si je vous vends un presse-purée, pourquoi voulez-vous que je réclame des droits sur la purée cuisinée par le consommateur. C'est à lui. Je n'ai pas à intervenir ». De la même manière, on ne peut pas vendre des données qui ne nous appartiennent pas. De toute façon, les consommateurs iront, comme d'habitude, vers les marques auxquelles ils font confiance. »

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